Salutations à toutes et à tous !
Bienvenue dans The Next Wave: Francophone Africa, votre rendez-vous hebdomadaire pour une immersion complète dans l’univers technologique des pays francophones d’Afrique. Retrouvez les éditions précédentes en ligne. Dorénavant, cette newsletter vous parviendra chaque mardi à midi directement dans votre boîte mail. Par défaut, elle est rédigée en français, mais vous pouvez basculer vers la version anglaise via le bouton ci-dessous. Dès la semaine prochaine, elle prendra le nom de Francophone Weekly.
Depuis son lancement le 17 juin, cette série met en lumière l’essor rapide des pays francophones d’Afrique, qui s’imposent comme des centres dynamiques pour les start-ups et les investissements en capital-risque. Cette progression est soutenue par des politiques innovantes et des cadres réglementaires en constante évolution, favorisant l’émergence de secteurs technologiques prometteurs.
Dans notre premier numéro, nous avons exploré les piliers de l’écosystème francophone subsaharien, en mettant l’accent sur la Côte d’Ivoire et le Sénégal. Ces nations bénéficient d’un climat politique favorable aux start-ups, d’un appui gouvernemental à l’innovation et d’un esprit entrepreneurial vigoureux, qui ensemble façonnent des environnements florissants. Ces États ne se contentent pas de réguler, ils participent activement à la construction de l’économie numérique de demain.
La deuxième édition a élargi notre champ d’analyse à l’Afrique centrale et au Maghreb, en prenant le Cameroun et l’Algérie comme exemples de résilience et de transformation. Ces marchés, caractérisés par des identités multiples, des réformes politiques et une accélération numérique, démontrent que la croissance repose autant sur l’adaptabilité que sur la taille.
Aujourd’hui, nous concentrons notre regard sur la Tunisie, un marché modeste mais stratégique, qui illustre que la puissance ne se mesure pas à la superficie. Après avoir évoqué un succès emblématique comme Instadeep, nous examinons d’autres facettes de ce marché. La clarté des politiques, l’optimisation des capitaux et une gouvernance numérique avancée y sont mises en œuvre avec une efficacité encore rare dans des hubs plus anciens.
Entrons sans plus attendre dans le vif du sujet.
1. Tunisie : un petit pays au potentiel immense

Réputée pour sa stabilité politique et son développement avancé, la Tunisie affiche une vitalité économique remarquable. Son écosystème est alimenté par des investissements étrangers, des politiques stratégiques et des infrastructures comparables à celles des principaux pôles africains de start-ups.
Malgré sa superficie réduite, la Tunisie déploie une énergie considérable. Elle bénéficie d’un climat politique parmi les plus favorables aux jeunes entreprises et d’un vivier d’ingénieurs parmi les plus qualifiés du continent, attirant ainsi des innovations à forte valeur ajoutée et à faible intensité capitalistique.
Une législation novatrice : la Tunisie a été pionnière en Afrique en adoptant dès 2018 une loi dédiée aux start-ups, renforcée par la Startup Act 2.0 en 2024, qui offre des exonérations fiscales, des fonds d’amorçage et des congés rémunérés pour les fondateurs.
Un écosystème start-up en pleine expansion : plus de 1 450 start-ups sont officiellement enregistrées, dont 17 ont franchi des étapes majeures de développement. La cession d’Instadeep à BioNTech pour 100 millions de dollars illustre parfaitement cette dynamique.
Des compétences techniques de haut niveau : grâce à un taux d’alphabétisation élevé et une solide tradition en ingénierie, la main-d’œuvre tunisienne dans le secteur technologique est à la fois qualifiée et compétitive en termes de coûts.
Un soutien étatique au capital-risque : le fonds Anava, doté de 100 millions d’euros, accompagne les start-ups en phase d’amorçage et de croissance. Le pays compte également plus de 80 incubateurs et 34 centres de recherche et développement, qui stimulent l’innovation.
Une reconnaissance internationale : selon le rapport 2025 Global Startup Ecosystem Report (GSER), la Tunisie figure parmi les 20 écosystèmes de start-ups les plus compétitifs au monde, dominant la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA) dans plusieurs catégories :
- 3e rang mondial pour la rentabilité des talents techniques
- 2e place dans la région MENA pour l’efficacité du capital et la valeur des financements en phase initiale
- Top 10 mondial pour le rapport qualité-prix de l’écosystème start-up, c’est-à-dire la capacité à maximiser les ressources
- La valorisation de l’écosystème a atteint 113 milliards de dollars entre mi-2022 et fin 2024, portée par des sorties comme Instadeep et des expansions régionales.
Une infrastructure étendue : l’écosystème tunisien s’étend bien au-delà de Tunis grâce à des parcs technologiques tels qu’Elgazala et Sfax Technopole, ainsi que des pôles régionaux dynamisés par l’iSME Innovation Roadshow 2025, qui a stimulé les acteurs à Kairouan, Gabès et Bizerte. Le pays dispose de 4 technopoles, 19 cyberparcs et 10 pôles de compétitivité.
Des secteurs en plein essor : la Tunisie s’impose rapidement comme un leader africain dans les domaines de la santé, de l’intelligence artificielle et de l’innovation climatique :
- Le programme Flywheel HealthTech, soutenu par la Banque mondiale, accélère les start-ups spécialisées dans la femtech et la medtech.
- Un nouveau centre d’innovation en IA, inauguré en septembre 2024 en partenariat avec NVIDIA, forme les entrepreneurs aux technologies avancées, aux grands modèles de langage arabes et aux applications civiques.
- Des start-ups telles que Wattnow (IoT énergétique), CureBionics (prothèses bioniques) et FabSkill (recrutement assisté par IA) attirent l’attention et les investissements internationaux.
Digitalisation et protection des entrepreneurs : la Tunisie a numérisé plus de 3 200 services administratifs, dont 75 % sont accessibles en ligne. Les fondateurs bénéficient des garanties offertes par la loi sur les start-ups, incluant la couverture sociale, un enregistrement accéléré et un projet de visa pour nomades numériques. Les lois sur la cybersécurité et la protection des données ont été actualisées en 2023, facilitant les opérations transfrontalières et la levée de fonds conformes aux normes.
2. Enjeux à surveiller

La Tunisie fait face à un défi majeur : la fuite continue des talents. Si l’activité est intense au stade initial, son écosystème de scale-ups demeure moins mature que ceux d’Égypte, du Nigeria ou du Kenya. Cependant, un afflux croissant d’entrepreneurs rapatriés, de capitaux issus de la diaspora et d’accélérateurs internationaux modifie rapidement cette dynamique.
En synthèse :
La Tunisie démontre qu’un petit marché doté de fondations solides peut croître rapidement et intelligemment. Sa législation sur les start-ups lui confère un avantage distinct, tandis que le soutien continu des fonds publics, des infrastructures numériques et la création d’un écosystème régional maintiennent cette dynamique. Néanmoins, cette progression s’accompagne de défis.
Le fossé de croissance reste perceptible. La fuite des cerveaux continue d’aspirer les talents vers l’étranger. Par ailleurs, si les politiques sont prometteuses sur le papier, leur mise en œuvre reste souvent lente, surtout en dehors de Tunis. Toutefois, grâce à la reconnaissance internationale de son écosystème, à l’intérêt croissant des investisseurs et à une main-d’œuvre technique capable d’optimiser les ressources, la Tunisie est bien positionnée : elle n’est pas parfaite, mais elle progresse. Pour les observateurs avertis, c’est un marché à suivre de près.






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